Les émotions passent. Elles durent en moyenne 90 secondes.

lespetitsmotsdecar
26 nov. 2023
3 min de lecture

Isabelle Filliozat

Les émotions passent. Elles durent en moyenne 90 secondes. Mais parfois, ça nous semble plus compliqué que ça !

Je me suis toujours sentie un peu maladroite avec mes émotions. Ma mère et ma sœur étaient extraverties, mon père et moi étions plutôt introvertis. Je crois que mon frère se retrouvait entre les deux. Lorsque ma mère se cognait, on l’entendait crier au martyr. À l’inverse, quand je me fais mal, j’émets un petit ‘’ouch’’ et je réprime ma douleur.

C’est comme si je me sentais embarrassée devant un débordement d’émotions, envahie par l’intensité des émotions de l’autre. Et en même temps terrifiée par certaines de mes émotions comme la colère. Celle-ci pouvait à certains moments se transformer en rage quand je la réprimais trop longtemps, que je me sentais impuissante et que le couvercle sautait.

Je crois que c’est vers l’âge de huit ans que j’ai commencé à me dissocier de mes émotions, principalement à l’extérieur de ma famille. Le problème avec la dissociation, c’est qu’en me coupant de certaines de mes émotions, je ne ressentais pas où étaient mes limites. La dissociation est un des facteurs qui amène à la dépendance de substances ou de comportements.

Un jour, j’ai entendu qu’une émotion a un début, un milieu et une fin sauf si je refuse de la ressentir et que je la camoufle. Quand j’ai arrêté de manger compulsivement, une foule d’émotions ont commencé à remonter et il fallait parfois me prendre avec des pincettes…

J’ai beaucoup travaillé cet aspect avec ma psychologue. Cela m’a pris du temps à accepter de ressentir, nommer et accueillir mes émotions. « Une émotion est une énergie qui transporte de l’information. » Quand je suis à l’écoute de mon ressenti, cela m’aide à identifier et à répondre à mon besoin au lieu d’accumuler la pression.

On m’a souvent dit que j’étais patiente, entre autres avec les enfants et je pense que c’est une de mes qualités. Mais poussée à l’extrême, cela m’a mise dans des situations où je laissais les enfants dépasser mes limites et je finissais par me sentir impuissante, perdre le contrôle et crier pour tenter de ramener un peu d’ordre.

Art-Mella est une dessinatrice qui a créé plusieurs bandes dessinées sur ce thème. Elle a publié une carte des émotions très intéressante qui m’a permis de mettre des degrés sur mes émotions. Par exemple, au début, je peux me sentir irritée par une situation, puis contrariée, énervée, exaspérée, furieuse pour finalement exploser de rage.

Les dernières années pendant lesquelles j’ai enseigné, j’étais beaucoup plus aux aguets pour identifier ces signes avant-coureurs. J’ai souvent réussi à exprimer à mes élèves mes demandes reliées à mes besoins et par le fait même à être un meilleur modèle pour leur montrer à exprimer leurs besoins de façon respectueuse. Cela a évité bien des frustrations et des crises. « C’est comme si notre cerveau se morcelait comme un casse-tête qui tombe à terre: les mille et une pièce se répandent sur le sol. La fragmentation morcèle les souvenirs, les sensations et les actions pour éviter des dommages permanents dans notre cerveau. » explique Joël Monzée.

Depuis, j’ai élargi le spectre de mes émotions. Bien qu’il y ait des moments présents parfois inconfortables ou franchement ennuyants, je sais que les émotions passent. Je m’applique à laisser l’émotion me traverser sans me laisser submerger

Caro